La vie du buronnier à travers les âges : Du mazuc au buron…
Fièrement accrochés à la montagne, taillés dans la pierre et la lauze, les burons, emblèmes des hauts plateaux cantaliens, se dressent au milieu des pâturages. Construits pour résister aux caprices du climat, ils étaient aussi le lieu de vie des vachers qui accompagnaient les troupeaux aux estives de la Saint-Urbain le 25 mai à la dévalade qui se situait autour de la Saint-Géraud le 13 octobre.
Une équipe de buronniers était dirigée par un cantalès, le patron-vacher était chargé de fabriquer le fromage (salers, cantal), le beurre et la truffade. Parfois, il est assisté d’un boutilé ou boutillier. Aux côtés du cantalès, il y avait le pâtre qui gardait et rassemblait le troupeau pour la traite, le bédelier chargé de s’occuper des veaux et le roul, l’homme à tout faire souvent en apprentissage.
Au XIIIème siècle, des textes commencent à mentionner la pratique du pâturage d’estive. La première mention d’un ancêtre des burons dans les Monts du Cantal est datée de 1265. Elle concerne une « redevance qui sera levée sur chaque cabane à fromage nouvellement construite » dans le mandement de Saint-Martin-sous-Vigouroux. Pendant de nombreux siècles, les bergers réalisent des constructions éphémères; de simples cabanes en bois recouvertes de végétaux creusées dans le sol ou partiellement enterrées. On nomme traditionnellement ces trous, tras ou mazucs.
Aujourd’hui, un simple survol sur Google Earth des montagnes cantaliennes permet de repérer les Mazucs regroupés, les plus anciens datent du Moyen-Age. En effet, la propriété foncière revêtait un caractère collectif et les éleveurs devaient tenir leurs parcs et burons tous ensemble au même endroit de la montagne. Les mazucs ont subsisté jusqu’au XVIIIème siècle.
On suppose que les premiers burons édifiés complètement en pierre, vers le milieu du XVIIème siècle, avec une voûte en encorbellement sont dus à l’initiative du Comte de Brancas. Le buron désigne un édifice semi-enterré et voûté, divisé en deux pièces servant de fromagerie et de cave pour conserver et affiner les fourmes fabriquées quotidiennement. Ils sont très souvent accompagnés d’un bâtiment plus vaste, le védélat ou bédélat où sont logés les veaux pendant la nuit et le jour par grosse chaleur, et de loges à cochons, de taille plus modeste. Liés au statut social des propriétaires, les burons en pierre se sont développés, ont été réaménagés et occupés jusqu’au XXème siècle.
Aux XVIIème et XVIIIème siècle, un système d’exploitation s’était mis en place dans les pâturages. En effet, la montagne est divisée en 2 parties : la fumade et les aigades. On appelle fumade la partie entourant le buron où sont parquée les vaches et fumée par elles, et le reste constitue les aigades, de vastes terrains de parcours traversant le plateau.
Actuellement, certains burons ont été transformés en refuges de montagne, en restaurants d’altitude ou en résidences estivales et offrent aux touristes des paysages à couper le souffle. Mais beaucoup de burons sont en ruines car la production fromagère traditionnelle s’est raréfiée dans les montagnes au profit des laiteries, l’association pour la sauvegarde des burons du Cantal, créée en 1984, œuvre à la restauration de ce patrimoine bâti.
Nous vous donnons rendez-vous à la montée aux estives pour découvrir la suite de « la vie du buronnier à travers les âges » sur le Blog du fromager de Morin Fromager !
Sources :
Christian Marchi, « Le Cantal », Éditions de Borée, 1995.
Jean-Claude Roc, « Burons de Haute-Auvergne », Éditions Watel, 1992.
Stéfan Tzortzis et Xavier Delestre (dir.), « Archéologie de la montagne européenne », Actes de la table ronde internationale de Gap, 29 septembre-1er octobre 2008, « Recherches sur l’histoire de l’occupation humaine sur la planèze sud du Plomb du Cantal », Frédéric Surmely, Violaine Nicolas, Stéfan TzorTzis, Yannick Miras, AuréliesaviGnaT, Pascal GueneT, Gabriel servera, Stéphane PeTiT, Publications du Centre Camille Jullian, Éditions Errance, 2010.